juillet - 2016


AUTEUR : LIONEL PARAIRE

Réforme du contentieux social

Le décret n°2016-660 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud’homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail, pris pour l’application de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 dite Macron, réforme profondément la procédure du contentieux social, tant devant le conseil de prud’hommes que la cour d’appel.

Selon le ministère du travail, ces textes « rénovent la procédure applicable devant [le conseil de prud’hommes] afin d’en augmenter l’efficacité et de réduire les délais de jugement ».

1.    Saisine du conseil de prud’hommes

- L’acte de saisine

Alors que le conseil de prud’hommes pouvait être saisi sur simple demande formée au greffe, le Code du travail dispose désormais que « la demande en justice est formée soit par une requête, soit par la présentation volontaire des parties devant le bureau de conciliation et d’orientation » (art. R.1452-1 du Code du travail).

Outre les éléments d’usage (noms et coordonnées des parties, objet de la demande…), la requête doit contenir, à peine de nullité, un exposé sommaire des motifs de la demande et chacun des chefs de celle-ci.

Par ailleurs, la requête doit également être accompagnée des pièces, suivant bordereau, que le demandeur souhaite invoquer à l’appui de ses prétentions (art. R.1452-2 du Code du travail).

- La convocation à l’audience

Le demandeur est avisé par tous moyens par le greffe de la date d’audience. Cet avis l’invite à adresser ses pièces au défendeur avant l’audience et indique qu’en cas de non comparution sans motif légitime, il pourra être statué en l’état des pièces et moyens contradictoirement communiqués par l’autre partie.

Le défendeur est ensuite convoqué par le greffe par lettre recommandée avec avis de réception. Un exemplaire de la requête et du bordereau de pièces adressées par le demandeur sont annexés à la convocation.

Le défendeur est invité à déposer ou adresser au greffe les pièces qu’il entend produire et à les communiquer au demandeur (art. R. 1452-4 du Code du travail).

2.    Assistance et représentation des parties devant le conseil de prud’hommes

L’assistance et la représentation restent libres devant le conseil de prud’hommes, les parties pouvant aussi se défendre elles-mêmes.

- Le défenseur syndical

Un nouveau statut de « défenseur syndical » est créé, avec des fonctions d’assistance ou de représentation devant le conseil de prud’hommes et la cour d’appel en matière prud’homale.

Ce défenseur syndical, qui a vocation à remplacer les délégués syndicaux pour l’exercice des droits de la défense,  est inscrit sur une liste arrêtée par l’autorité administrative sur proposition des organisations syndicales représentatives d’employeurs et de salariés.

- L’assistance ou la représentation par un avocat

Contrairement aux autres représentants, l’avocat n’a pas à justifier d’un pouvoir spécial pour représenter son client aux audiences.

Lorsque toutes les parties comparantes sont assistées ou représentées par un avocat et qu’elles formulent leurs prétentions par écrit, leurs conclusions doivent formuler précisément leurs prétentions et les moyens de droit ou de fait sur lesquels elles s’appuient.

 

Par ailleurs, il convient de noter que le Code du travail dispose désormais que « les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif. Le bureau de jugement ou la formation de référé ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif. Les parties doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et il n'est statué que sur les dernières conclusions communiquées » (art. R.1453-5 du Code du travail).

3.    Conciliation et jugement

- Le bureau de conciliation et d’orientation (BCO)

En cas d’échec de la conciliation, l’affaire n’est plus systématiquement renvoyée devant le bureau de jugement. Le BCO assure désormais une mise en état de l’affaire jusqu’à la date qu’il fixe pour l’audience de jugement.

Après avis des parties, le BCO fixe les délais et conditions de communication des prétentions, moyens et pièces, étant précisé qu’en cas de non-respect du calendrier de procédure, le BCO peut radier l’affaire ou la renvoyer à la première date utile devant le bureau de jugement.

Il peut également désigner un ou deux conseillers rapporteurs pour procéder à la mise en état de l’affaire.

En cas d’absence du demandeur à la séance de conciliation et d’orientation, s’il ne justifie d’aucun motif légitime, le BCO peut :

-       Renvoyer l’affaire en bureau de jugement ;

-       Déclarer la caducité de la requête et de la citation ;

-       Juger immédiatement l’affaire si le défendeur le sollicite, en fonction des pièces et moyens communiqués contradictoirement.

Si l’absence du demandeur est justifiée par un motif légitime, l’affaire est renvoyée devant un nouveau BCO.

En cas d’absence du défendeur sans motif légitime, le BCO peut décider de juger l’affaire immédiatement, si les pièces et moyens ont été communiqués contradictoirement. Il ne peut renvoyer l’affaire en bureau de jugement que pour s’assurer de la bonne communication des pièces et moyens au défendeur (art. R. 1454-1 et s. du Code du travail).

Il convient en outre de noter que l’incompétence de section doit désormais être soulevée exclusivement devant le BCO, sauf si le bureau de jugement est saisi directement (art. R. 1423-7 du Code du travail).

Si l’affaire est en état d’être jugée immédiatement, l’audience du bureau de jugement peut avoir lieu « sur-le-champ » (art. R. 1454-18 du Code du travail).

Enfin, depuis la loi Macron, la possibilité est ouverte au BCO de renvoyer les parties directement en départage, si elles le demandent ou si la nature du litige le justifie (article L. 1454-1-1 du Code du travail).

-          Le bureau de jugement

Tout comme le BCO, le bureau de jugement peut également organiser la mise en état de l’affaire. C’est notamment le cas lorsque cette dernière est portée directement devant lui, ou s’il s’avère qu’elle n’est pas prête à être jugée.

Si le calendrier de procédure n’est pas respecté par les parties, le bureau de jugement peut rappeler l’affaire à l’audience, en vue de la juger ou de la radier.

Les prétentions, moyens et pièces communiqués sans motif légitime après la date fixée pour les échanges et dont la tardiveté porte atteinte aux droits de la défense, sont écartés des débats.

Si le défendeur ne comparaît pas sans motif légitime, le bureau de jugement peut statuer sur le fond.

Si le demandeur ne comparaît pas sans motif légitime, le défendeur peut demander à ce qu’il soit statué sur le fond. Le bureau de jugement peut également prononcer la caducité de l’affaire. Le demandeur a la possibilité de rapporter la caducité dans les quinze jours s’il justifie d’un motif légitime.

En cas d’absence légitime, tant du demandeur que du défendeur, l’affaire est renvoyée à une date ultérieure (art. R. 1454-19 et s. du Code du travail).

La loi Macron a institué une faculté de réunir le bureau de jugement en formation restreinte, composée d’un conseiller employeur et d’un conseiller salarié.

L’affaire peut être renvoyée devant le bureau de jugement dans sa formation restreinte dans les cas suivants :

-   Avec l’accord des parties, si le litige porte sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail (dans ce cas, le bureau de jugement doit statuer dans un délai de trois mois) ;

-   Lorsque le défendeur ne comparaît pas sans avoir justifié en temps utile d’un motif légitime devant le BCO.

4.    Procédure en appel

En matière sociale, la représentation est désormais obligatoire devant la cour d’appel, étant notamment précisé que la procédure d’appel est soumise aux droits d’un timbre fiscal de 225 €.

Les parties doivent donc être représentées soit par un avocat inscrit dans le ressort de la cour d’appel compétente, soit par un défenseur syndical (art. R. 1461-1 du Code du travail).

Le rythme de la procédure est sensiblement accéléré :

-   A peine de caducité, l’appelant dispose d’un délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel pour conclure (article 908 du Code de procédure civile).

-   Quant à l'intimé, il dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant pour conclure et former, le cas échéant, appel incident (article 909 du Code de procédure civile). 

Entre avocats, tous les actes de procédure sont communiqués par voie électronique.

Le défenseur syndical devra, quant à lui, établir les actes de procédure sur support papier.

Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées (art. 954 du Code de procédure civile).

5.    Résolution amiable des différends

Le BCO est habilité à homologuer l’accord issu d’un mode amiable de résolution des différends.

En outre, le BCO et le bureau de jugement peuvent, quel que soit le stade de la procédure :

-       Désigner un médiateur, sur accord des parties, afin de les entendre et de confronter leurs points de vue pour permettre de trouver une solution au litige qui les oppose ;

-       Enjoindre les parties à rencontrer un médiateur qui les informe sur l’objet et le déroulement de la mesure (art. R. 1471-2 du Code du travail).


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